Microscopie confocale
Microscopie confocale pour l’étude in vivo de la cornée
La microscopie confocale permet d’observer in vivo les différentes composantes du tissu cornéen : épithélium, plexus nerveux sous épithélial, stroma et endothélium.
La couche de Bowman et la membrane de Descemet ne peuvent pas être visualisées directement avec la microscopie confocale, du moins pour les cornées saines.
La microscopie confocale s’effectue sous anesthésie locale, et son principe est relativement simple. Le microscpoe confocal effectue un balayage permanent d’une section coronale de la cornée, où il éclaire une petite portion de tissu qui est observée de manière « confocale », en « filtrant » spatialement la lumière diffusée par les couches de tissus en arrière et en avant de la couche inspectée.
Un des premiers instruments disponibles était le microscope « Confoscan ». Actuellement, on peut utiliser le rétinographe Heidelberg, qui reprend les principes de la microscopie confocale en utilisant une lumière laser (longueur d’onde : 633 m). Initialement destiné à l’étude du tissu rétinien, il peut être transformé en un microscope confocal cornéen de haute résolution, muni d’un adaptateur particulier (Rostock corneal module).
Les images fournies ont une densité spatiale de 384 x 384 point image (le côté de l’image mesure 400 micron) et la magnification est de X 63. La résolution est limitée par le double passage aller et retour, en utilisant les propriétés de la seule diffraction, le calcul du diamètre de la tache centrale d’Airy est au moins égal à 2.44x 633, soit une résolution latérale minimale de 1,5 microns environ.
Etude de la cornée par microscopie confocale
Cette étude offre la possibilité de visualiser les structures dont les dimensions sont de quelques microns.
Epithélium cornéen
L’épithélium de la cornée humaine est composé de 5 ou 6 couches de cellules, dont la morphologie varie de la superficie vers la profondeur : les plus superficielles sont aplaties, les cellules intermédiaires sont polygonales, et les cellules basales (une assise cellulaire) sont cylindriques. La densité des cellules superficielles varie entre 500 et 2000 cellules par mm2. La densité des cellules basales varie entre 4000 et 7000 cellules par mm2. L’épaisseur cornéenne centrale moyenne est proche de 50 microns.
Plexus nerveux sous épithélial
L’innervation de la cornée dépend des nerfs ciliaires longs, qui proviennent de la branche ophtalmique du nerf trijumeau. Les rameaux de nerfs pénètrent la cornée par le limbe, et forment un plexus (réseau) stromal profond, qui est anastomosé avec un plexus sous basal et sous épithélial superficiel. Le plexus nerveux sous basal (en avant de la couche de Bowman) et sous épithélial (en arrière de la couche de Bowman) peut être étudié in vivo grâce à la microscopie confocale. On observe généralement des fibres nerveuses fines et brillantes, d’une épaisseur comprise entre 4 et 6 microns.
Stroma
Le stroma cornéen représente 90% de l’épaisseur de la cornée ; sur le plan structurel, on peut le scinder en 3 compartiments : cellulaire, extracellulaire, et neurosensriel. Le compartiment cellulaire est essentiellement composé de kératocytes, dont le volume total n’est qu’approximativement que 5% du volume cornéen total. Les 95% restant comportent les lamelles collagène (surtout de type I) et la substance interstitielle, et les fibres nerveuses isolées ou organisées en plexus. En microscopie confocale, on ne peut pas véritablement observer les structures acellulaires qui sont transparentes à la lumière ! Les corps réflectifs brillants que l’on observe généralement sont ceux des noyaux des kératocytes, qui se détachent au sein d’un fond sombre (matrice extracellulaire). La densité moyenne des kératocytes est plus importante en superficie (600 à 1600 cellules par mm2.) qu’en profondeur (500 à 1000 cellules par mm2. La morphologie des noyaux cellulaires varie en fonction de la profondeur : plus arrondis en superficie, plus ovalaire en profondeur. Quand ces kératocytes sont « activés », leur activité métabolique leur procure un aspect particulièrement brillant.
Endothélium
La densité en cellules endothéliales est maximale à la naissance (jusqu’à 7500 cellules par mm2), puis décline pour atteindre une valeur moyenne proche de 2700 cellules par mm2 chez les adultes jeunes (1600 à 3200 cellules par mm2). Si la densité des cellules endothéliales décline en deçà de 500 cellules par mm2, la décompensation cornéenne est à redouter. Le pourtour des cellules endothéliales saines est hexagonal, et leur taille relativement homogène (la surface d’une cellule peut varier entre 200 et 500 nanomètre carrés). Certains processus pathologiques comme la dystrophie de Fuchs peuvent entraîner une modification de cette géométrie, ou l’apparition de cellules de tailles variable.
Dystrophies cornéennes
Les dystrophies cornéennes représentent un large éventail de pathologies non inflammatoires et dégénératives e la cornée: elles constituent un vaste champ d’application pour la microscopie cornéenne confocale in vivo: cette technique est utile au diagnostic objectif et à la compréhension des altérations des structures cornéennes concernées.
Dystrophie de Cogan
La dystrophie de Cogan est la plus fréquente des dystrophies cornéennes. Elle est héréditaire, mais il existe des formes sporadiques. Elle affecte un pourcentage non négligeable de la population ; celui-ci est variable selon les études, mais est au moins de 2%. Elle affecte les deux yeux et concerne le contingent épithélial de la cornée. Les symptômes de la dystrophie de Cogan sont liés à des érosions récidivantes de l’épithélium cornéen. Elles peuvent apparaître de manière spontanée à l’adolescence, ou être secondaire à un traumatisme direct même léger : doigts dans l’œil, éraflure par une feuille de papier ou de plante, accident de maquillage, etc. Typiquement, un larmoiement et des douleurs lancinantes oculaires réveillent le patient vers le petit matin. L’examen au biomicroscope (lampe à fente) révèle des lésions superficielles linéaires et grisatres, dont les contours peuvent évoquer selon l’imagination des cartes de géographies, des empreintes de doigts, ou des petits kystes.
A cette description imagée bi dimensionnelle, la microscopie confocale a apporté des éléments objectifs et « tri dimensionnels ». La dystrophie de Cogan est liée à une fabrication anormale de la membrane basale de l’épithélium. Au lieu d’être tendue sous les cellules basales de l’épithélium, cette tunique présente de multiples expansions intra épithéliales ; de fait, l’adhérence de l’épithélium basal est réduite, ce qui explique la survenue d’érosions répétées. Les cellules épithéliales migrent de manière anormales, et peuvent être prisonnières des replis de membrane basale.
Le traitement de la dystrophie de Cogan débute par la prescription d’agents mouillants et lubrifiants. En cas de persistance de symtômes invalidants, une photokératectomie à visée thérapeutique (PTK ou PKT) peut être effectuée grâce au laser excimer. Ce traitement à une grande efficacité et permet souvent de supprimer les crises, ou d’en réduire la fréquence et l’importance.
Dystrophie de Schnyder
La dystrophie cristalline de Schnyder est une dystrophie cornéenne héréditaire rare. Ses formes cliniques sont diverses, de même que ses manifestations; parfois silencieuse, parfois source de baisse d’acuité visuelle.
Décrite pour la première fois en 1924 par Van Went et Wibaut, elle est définie en 1929 par Schnyder comme une entité héréditaire individualisée. Elle se caractérise classiquement par la présence d’opacités cornéennes centrales bilatérales en disque ou en anneau, constitués de lipides tels que le cholestérol sous formes de cristaux. Nous avons rapporté une forme annulaire sans cristaux, de découverte fortuite.
La dystrophie de Groenouw de type I (dystrophie granulaire de la cornée)
La dystrophie de Groenouw de type I (dystrophie granulaire de la cornée) est une affection héréditaire, qui concerne le stroma de la cornée. Elle est liée à la présence d’une mutation au niveau d’un gène (TGFBI) situé sur le chromosome 5q31 qui est responsable de la formation de kératoépithéline.
Il s’agit d’une affection autosomique dominante: l’atteinte d’un parent peut suffire à transmettre la maladie. Elle est généralement découverte dans l’enfance ou à l’adolescence, où l’on observe au niveau de la cornée centrale des dépots blanchatres ou translucides épars, dont l’aspect fait un peu penser à des miettes de pain. Ces dépôts sont situés dans la partie antérieure du stroma cornéen, sous la couche de Bowman qu’ils peuvent parfois perforer. La vision peut être progressivement atteinte en raison de la diffusion et l’irrégularité provoquée par ces lésions, qui peuvent également entrainer certains symptômes comme la photophobie, ou des douleurs superficielles oculaires récidivantes.
Les dépôts sont constitués de protéines non collagéniques, hyper réflectives. Ils atteignent rarement le limbe sauf dans des formes très avancées.
bonjour, ou est il possible de consulter en bretagne pour avoir cet examen ( microscopie confocale in vivo)merci.
Il peut être intéressant de réaliser des prélèvements locaux si une cause infectieuse est suspectée. La kératite amibienne est une affection qui n’évolue pas par poussées mais s’aggrave continûment en l’absence de traitement adapté.
Bonjour. J’ai eu examen par microscopie confocale il y a 10 jours. C’était pour une suspicion de kératite amibienne. Il n’y a rien été trouvé. Cependant depuis cet examen mon œil est à nouveau rouge et douloureux alors qu’il ne l’était plus auparavant. Est ce normal ?!
La microscopie confocale peut apporter certains élements objectifs comme la présence d’éléments microbiens (amibes) et certaines dystrophies de la cornée.
Bonjour Dr Gatinel
Peut on utiliser la microscopie confocale pour trouver l origine d infiltrats cornéens et un traitement pour la même occasion.
Merci d avance
Aurélie Rochette
Je n’ai pas d’information à ce sujet, l’examen de microscopie confocale cornéenne permet de visualiser les structures cellulaires et tissulaires de la cornée, qui ne sont à priori pas impliqués dans le Covid long. La présence d’une inflammation des nerfs intracorneens est également perceptible avec cet examen et c’est peut être ce qui est recherché.
Bonjour, la technique de microscopie confocale permet apparemment d’identifier les anomalies de la cornée dans le covid long. Pouvez-vous m’indiquer si cet examen peut-être obtenu dans toutes les régions et si l’établissement d’une ligne de base via cet outil vous paraît pertinent dans cette pathologie ?
Merci à l’avance, cordialement,
C. LE BRAS
La microscopie confocale est une technique qui permet de réaliser des images en coupe du tissu cornéen à une échelle « histologique », mais elle ne permet pas de valider des indications (ou d’invalider des contre indications) fondées sur des données et une expérience clinique antérieures à la généralisation de cette technologie. Les études comme celles que vous rapportez sont un pas dans cette direction, mais dans votre cas, elle ne pourrait fournir assez de certitudes pour vous proposer une intervention non risquée.
Bonjour Dr Gatinel,
Vous m’avez vu en consultation en 2015 pour un avis pour une retouche lasik pour hypermétropie, que vous m’avez déconseillée en raison d »érosions cornéennes suite à la PKR de surface que j’avais eu en 1998 pour myopie.
Pour l’instant je n’ai donc rien fait.
Ma question : Est-ce qu’une en étude microscopie confocale permettrait d’avoir une indication supplémentaire concernant le risque opératoire en cas de lasik (récurrence d »érosions). D’autre part, une OCT cornéenne aurait-elle un intérêt (une publication récente semble le montrer – (Diez-Feijóo, Cornéa, 2015, 34(3) 290-295)
Cordialement – Dr Thierry Bonnefoix – CHU GHrenoble