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Aberrométrie

Aberrométrie : définition

L’aberrométrie est une technique qui permet d’étudier de manière fine et précise les propriétés optiques de l’oeil humain. L’aberrométrie est une science dérivée de la métrologie optique (étude de la qualité  des systèmes optiques), et plus directement de l’astronomie. En ophtalmologie, l’aberrométrie rassemble les techniques destinées à étudier la qualité optique de l’oeil, et/ou la qualité de l’image rétinienne.  Ces techniques d’examen permettent d’accéder à l’étude fine des propriétés optiques de l’oeil, dont les surfaces réfractives sont la cornée et le cristallin.Elles reposent sur le recueil du front d’onde oculaire avec un aberromètre, et/ ou l’analyse de la qualité optique de la cornée avec un topographe cornéen (consulter la page plus générale consacrée à « oeil et optique » au besoin).

Aberrométrie et ophtalmologie

A quoi sert l’aberrométrie?

Les applications de l’aberrométrie en ophtalmologie sont nombreuses, et intéressent en particulier l’ensemble des techniques modernes d’étude et de correction des défauts optiques de l’oeil humain: la chirurgie réfractive fait appel à l’aberrométrie pour la conception de traitements personnalisés, et l’étude des conséquences réfractives (optiques) de certaines complications.

Intérêt diagnostique de l’aberrométrie

L’examen aberrométrique est indiqué à chaque fois que l’on soupçonne l’existence d’une réduction de la qualité optique de l’oeil : cette réduction affecte le trajet de la lumière dans l’oeil, et donc l’image rétinienne. Les symptômes d’appel ne se limitent pas à une réduction de l’acuité visuelle, mais associent le plus souvent une impression de dégradation de la vision qui n’est pas corrigible en lunettes, et se caractérise par des symptômes plus particuliers comme un dédoublement des images, des halos autour des sources de lumière vive, une impression d’image moins contrastée. Ces symptômes concernent l’ensemble de la vision centrale, et non un point particulier dans le champ visuel. Ils tendent à apparaître ou à s’accentuer quand la pupille irienne se dilate, ce qui survient généralement quand la luminosité ambiante diminue.

La compréhension des principes fondateurs de cette approche relativement nouvelle pour le clinicien fait à appel à certaines connaissances du domaine de l’optique physique, et suppose la prise en compte de la nature ondulatoire de la lumière. L’ophtalmologiste reçoit habituellement une formation limitée en optique, en particulier physique. Malgré la versatilité des symptômes visuels relevants d’une cause aberrométrique, la plupart des ophtalmologistes éprouvent  certaines difficulté à appréhender ce domaine. Néanmoins, une profession, surtout médicale,  doit savoir évoluer et accroître son champ connaissance, dans l’intérêt premier des patients. L’oeil est le premier et le seul instrument d’optique que la Nature ait inventé; il serait regrettable qu’il soit le dernier à bénéficier de la même puissance et précision d’analyse que les téléscopes, microsopes ou objectifs photographiques.

En savoir plus sur la place de l’aberrométrie en ophtalmologie

Aberrométrie et optique adaptative

Le couplage d’un aberromètre avec un miroir déformable (optique adaptative) permet d’étudier directement les structures rétiniennes en s’affranchissant des aberrations optiques de l’oeil. Dans cette application, on est proche de l’astronomie où l’aberrométrie est née pour aider à réduire l’influence des turbulences atmosphériques sur la qualité des images recueillies par les télescopes terrestre. L’aberromètre mesure les aberrations de l’oeil et est asservi à un miroir déformable. Placé sur le trajet optique entre l’examinateur et la rétine à observer, ce miroir est déformé pour compenser les différences locales de chemin optique, qui sont liées aux imperfections de l’oeil. L’image de la rétine gagne en définition, et il est possible d’observer directement la couche des photorécepteurs (cônes, batonnets) de la rétine.

L’utilisation d’un miroir déformable peut également être mise à profit pour induire certaines aberrations et en étudier l’influence subjective sur la vision. Telecharger l’article « L’optique adataptive pour l’étude et la correction des défauts optiques de l’oeil humain « .
La possiblité de corriger ou d’induire sélectivement certaines aberrations optiques de haut degré et en étudier l’impact sur la fonction visuelle est intéressante dans le cadre de la correction de la presbytie par multifocalité.

Aberrométrie: principes généraux

Le recueil et l’analyse du front d’ondes (aberrométrie) représentent un progrès technologique pour l’étude de la réfraction équivalent à ce qu’a été la topographie cornéenne par rapport à la simple kératométrie. Comme le « rayon lumineux », le front d’onde oculaire est une « ‘abstraction » (c’est une surface théorique, une enveloppe de pourtour circulaire car délimitée par les bords de la pupille, et qui est perpendiculaire à la direction de propagation des « rayons » lumineux). Cette abstraction fournit un modèle utile pour quantifier et qualifier les aberrations optiques de l’oeil : le front d’onde est utile pour prédire la qualité de l’image rétinienne. L’aberromètre permet, après recueil et analyse du front d’onde oculaire, d’établir une carte des aberrations optiques de bas et de haut degré. Les aberrations dites de bas degré (degré 1 :tilt,  degré 2 :défocus, astigmatisme) correspondent aux aberrations qui sont corrigibles par des verres de lunettes. Les aberrations de haut (degré 3 :coma, trefoil,  degré 4 : tétrafoil, aberration sphérique, etc.) ne sont pas corrigibles en lunettes, et quand leur taux excède une certaine valeur, occasionnent des symptômes visuels à type de halos, dédoublement de l’image, impression de perte de contraste. Ces aberrations de haut degré sont parfois regroupées en ophtalmologie « classique » sous le terme d' »astigmatisme irrégulier ».

Le recueil du front d’onde sur un certain diamètre de pupille (idéalement large si l’on veut étudier la qualité de l’image rétinienne en conditions mésopiques) permet sa décomposition mathématique en aberrations de bas et de haut degré. permet de prédire la « fonction d’étalement du point » (« point spread function »), terme à la sémantique compliquée qui désigne cependant un concept très simple : celui de la préservation du stigmatisme, c’est à dire la fidélité de l’image d’un point lumineux source formée sur la rétine. Si l’image d’un point source est relativement ponctuelle sur la rétine, alors la déperdition qualitative de l’image rétinienne est faible: la taille minimale de l’image rétinienne (environ 2 microns dans les meilleures conditions) conditionne le pouvoir séparateur maximal de l’oeil, qui correspond à un angle miminum de résolution (MAR pour Minimum Angle of Resolution) de 30 secondes environ (soit une acuité visuelle proche de 20/10).

Aberrométrie et traitements lasers personnalisés

Le couplage de l’aberromètre et du laser excimer permet la mise au point de « traitements personnalisés » (customisés), qui visent non seulement à corriger le défaut optique  » de base  » (correction lunettes) mais aussi les aberrations de haut degré, dans le but d’optimiser la qualité de la vision en post opératoire. En dehors d’aspects marketing liés à la forte demande de « personalisation » (ou customisation), les traitements personnalisés sont surtout indiqués dans certaines circonstances comme la correction des forts astigmatismes, ou les reprises pour décentrement.

 

Exemples d’utilisation de l’aberrométrie

Afin d’illustrer l’intérêt de l’aberrométrie en ophtalmologie, des cartes montrant de manière emblématique les anomalies typiquement rencontrées dans certaines pathologies sont rassemblées dans les pages suivantes.

Oeil sainKératoconeVision dédoubléeDécentrement après LASIKImplant décentréCataracte débutanteCicatrice cornéenneImplant multifocalDégénérescence pellucide marginaleMyopie d’indiceGreffe de cornée

 

Elles ont été acquises au moyen du topographe- aberromètre OPD SCAN 3 (Nidek).

L’OPD SCAN 3 est un aberromètre topographe de dernière génération, dont certaines cartes (Optical Quality) ont été établies en collaboration avec le Dr Damien Gatinel

Cet instrument permet l’acquisition conjointe de données topographiques (topographie cornéenne Placido), et aberrométrique (front d’onde oculaire). Le calcul du front d’onde interne (face postérieure de la cornée, cristallin ou implant) est obtenu par soustraction. Contrairement à certains aberromètres spécifiquement conçus comme périphérique d’acquisition pour la réalisation de profils d’ablation guidés par l’aberrométrie, cet instrument ne se cantonne pas à cette application, et a été pensé comme un véritable outil diagnostic.

L’OPD SCAN III permet le recueil des informations suivantes :

– réfraction (sphère cylindre axe)

– mesure de l’asphéricité cornéenne

– analyse automatisée de la topographie cornéenne antérieure (corneal navigator, indices de Klyce et Maeda)

– mesure du front d’onde oculaire total (oeil entier) : aberrations de haut de bas degré (RMS – polynômes de Zernike)

– calcul des aberrations d’origine cornéenne : aberrations de haut de bas degré (RMS – polynômes de Zernike)

– calcul des aberrations d’origine interne : aberrations de haut de bas degré (RMS – polynômes de Zernike)

– calcul de la qualité optique de l’image rétinienne : Strehl ratio, MTF, acuité visuelle Snellen, Siemens Star, etc

5 réponses à “Aberrométrie”

  1. Fabrice dit :

    Bonjour,

    J’ai un soucis de diplopie monoculaire horizontale, sur un oeil seulement. Celle-ci n’est pas corrigée par les lunettes. Suite à un léger accident (ulcère suite à une branche dans l’oeil), cette diplopie s’est accentuée et a « tourné » ce qui fait que ma correction de lunettes précédente amplifie les symptomes.
    J’ai des difficultés à trouver un ophtalmologue qui investigue réellement ce problème. Pour la première fois, on m’a fait une topographie cornéenne (+ OCT et autres vérifications), qui n’ont rien révélé à part un léger astigmatisme. J’ai un nouveau bilan orthoptique à faire, mais je ne pense pas que cela révèle quoique ce soit (déjà fait avant l’accident, et cela n’avait rien révélé).
    Grâce à votre blog, j’ai demandé si une aberrométrie pouvait être réalisée, mais ils ne connaissaient pas…
    Je suis en région parisienne (91), j’ai déjà consulté plusieurs ophtalmologues: y a-t-il des centres spécialisés pour diagnostiquer (et traiter si possible) la diplopie (monoculaire) ?

    Egalement sur les relevés topographiques est indiqué un astigmatisme (flat) de -0.64D@177° (anterior) et 0.42D@1° (posterior). Pourtant la correction qui m’est proposée est (100° -0.5) +0: pourquoi l’angle de la correction ne correspond pas? Est-ce expliqué par une convention ophtalmo/opticien où l’on rajoute 90° pour exprimer la correction en cylindre positif ? La valeur de 0.5D proposée peut elle être reliée à l’amplitude du défaut mesuré (0.64+0.42) /2~=0.5 ?

    Merci par avance

  2. Thierno Madjou BAH dit :

    Bonjour !
    Je suis personnellement séduit par la carté de cet exposé qui prend en compte les réponses à beaucoup de mes questions.
    Par ailleurs, y’a-t-il possibilité de formation avec vous ?
    Très cordialement !

  3. Dr Damien Gatinel dit :

    L’aberrométrie peut permettre de comprendre pourquoi une correction en lunettes n’est pas efficaces ou pas complètement adaptée. En effet, l’aberrométrie permet de quantifier et qualifier des aberrations dites de « haut degré », qui ne sont pas corrigibles en lunettes mais peuvent influer sur la correction prescrites; ces aberrations peuvent induire des modulations de l’effet des verres qui corrigent l’astigmatisme, à titre d’exemmple.

  4. Liliane Delsart dit :

    L’aberrometre permet’il de réadapter les verres des lunettes ?
    Merci de votre réponse.
    Non je n’ai jamais posé cette question.

  5. Liliane Delsart dit :

    L’aberrometre permet’il de réadapter les verres des lunettes ?
    Merci de votre réponse.

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